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CHAPITRE V

Un vers sur la Per-flexion du Domaine.

9. De quelque manière que le fils des Vainqueurs fonctionne en circulant dans le Domaine varié des yeux, il sur-opère[1] symétriquement pour les créatures, pour leur salut, avec des termes bien appliqués et de même mesure.

De quelque manière que le Bodhisattva fonctionne dans le Domaine varié des Organes : yeux, etc., lorsqu’il est en train de circuler dans les occupations des Attitudes, d’une manière correspondante il sur-opère tout cela pour les créatures, dans le Sens du salut, par des propos de comparaisons appropriées. Comme le Gocara-pariçuddhi sûtra[2] l’expose en détail.

Un vers pour exclure le manque de Patience envers les créatures.

10. Puisque les créatures ont un État de pensée vicieux et qui n’est jamais libre, le Sage ne pèche[3] pas à leur propos ; il se dit : Ce n’est pas volontairement qu’ils prennent l’Initiative à rebours, — et sa pitié

  1. Abhinaṃskaroti. La valeur de ce mot et des formations dérivées varie en fonction du sens attaché au mot saṃskâra. Dans notre texte, il marque un degré supérieur du saṃskâra, comme abhijñâ « super-savoir » par rapport jñâna, comme abhisaṃbodhi « toute-parfaite illumination », par l’apport à saṃbodhi « pleine illumination ». Le tibétain traduit, élément par élément, mṅon ’du byed. Le chinois emploie presque partout l’expression kong-yong, dont il se sert aussi pour traduire âbhoga, et qui signifie « modifier en vue d’un certain usage par le travail » (cf. sup. I, 7). C’est une confusion de point de vue plus encore qu’une erreur de fait. Âbhoga est l’attitude passive de la pensée qui se prête à jouir ; abhisaṃskâra exprime une activité. Si le Bodhisattva se prête à l’action, les virtualités du futur que ses actes font passer en lui perdent leur coefficient de douleur dans le plan de la pensée où il se meut ; ce sont alors des forces neutres mises à sa disposition et qu’il utilise (= kong yong) pour le bien des créatures. À partir de la huitième Terre, le Bodhisattva est dégagé même de cette forme supérieure des samskâra ; il vit dans l’anabhisaṃskâra (v. inf. XI, 46 ; XVIII, 68 ; XIX, 4, 63 ; XX, 13, 19-20 ; particulièrement XX, 13, où âbhoga est significativement rapproché de abhisaṃskâra). La halte de la pensée, encore associée à l’abhisaṃskâra, répond à l’unité de ligne (ekotîkaroti, XIV, 14) ; dégagée de l’anabhisaṃskâra, elle est l’Union (samâdadhâti).
  2. Le Gocara-pariçuddhi sûtra est nommé dans l’énumération des textes sacrés, M. Vy., § 65, n° 51.
  3. Saṃdoṣa. La lecture est garantie par le tibétain ñes pa = doṣa. Viprapatti est un mot nouveau, substitué par raison métrique à vipratipatti qui est rétabli par le commentaire.