Page:Lévi - L’Inde civilisatrice, 1938.djvu/95

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

drait tant de sortes de populations qu’il y faudrait neuf séries d’interprètes, et le prestige de l’Empire couvrirait tout l’espace entre les mers. » Le grand historien Sseu-ma Ts’ien, contemporain de Tchang K’ien, archiviste et astronome de Wou ti, qui nous a conservé ce rapport dans ses Mémoires Historiques, ajoute : « L’Empereur fut transporté de joie ; il entra cordialement dans les vues de Tchang K’ien. Il donna l’ordre d’envoyer des missions d’exploration des pays de Chou et de Kien-wei [dans le Sseutch’ouan], dans quatre directions… Chacune d’elles put avancer entre 1 000 et 2 000 li. Mais ceux qui marchaient au nord furent arrêtés par les tribus des Te et des Tsö, ceux qui marchaient au sud furent arrêtés par les Souei et les K’ouen-ming [toutes ces tribus occupaient les régions voisines du Sseu-tch’ouan à l’ouest et au sud]. Les tribus K’ouen-ming n’ont pas de chefs ; elles s’adonnent au brigandage. Il arriva ainsi que les envoyés chinois tombèrent aux mains des maraudeurs, qui les tuèrent. En fin de compte on ne put ouvrir de passage dans cette direction ; mais les explorateurs entendirent parler de certains pays situés à un millier de li vers l’ouest, appelés Tien et Yue (Yun-nan et Kouang-tong), où les habitants montaient sur des éléphants, et les marchands du pays de Chou qui pratiquaient un commerce clandestin avec eux s’y rendaient à l’occasion. Ainsi donc [c’est toujours Sseu-ma Ts’ien qui parle] c’est en cherchant un chemin pour arriver au Ta hia [rives de l’Oxus] que les Chinois pénétrèrent pour la première fois jusqu’au pays de Tien [Yun-nan]. » Wou ti ne se résigna pas à cet échec, qui paralysait ses plans d’expansion vers l’ouest où l’attirait tout ce qu’il avait pu apprendre