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contre-coups, précurseurs du désastre final, se sont accumulés déjà. Vers 175, les Scythes ont enlevé à Eukratidès la Sogdiane, ils ont pénétré dans la Bactriane ; le concours intéressé des Parthes a permis d’écarter le péril ; c’était alors la vague des Wou-souen qui venait de passer, chassant devant elle les anciens possesseurs délogés des steppes. La pression des Wou-souen sur les Ta Yue-tche, en les refoulant vers l’ouest, détourne sur les Parthes la nouvelle menace. Les Ta Yue-tche tombent sur les tribus scythiques iranisées que l’usage courant désignait sous le nom collectif de Çaka (chinois Sai, ancienne prononciation Sak). Les Çaka rompent vers le sud, glissent sans doute entre le front parthe et le front grec, et vont traverser les passes de montagnes que les Chinois désignent par l’appellation générique de Hiuan-tou « passages suspendus » par allusion, disent-ils, aux ponts et aux échelles de corde qui servent à les franchir, mais où se dissimule certainement une transcription de la forme iranienne Hindu, nom de l’Inde, qui subsiste encore aujourd’hui dans le terme Hindou-Kouch, appliqué à la chaîne massive qui sépare la Bactriane de l’Inde. Ces Çaka, lancés malgré eux sur des routes nouvelles, allaient jouer un rôle inattendu dans les destinées ultérieures de l’Inde. Derrière eux, les Ta Yue-tche ont pris possession du pays que les Chinois nomment Ta hia (Grand Hia, comme la Sogdiane est Ta wan, Grand Wan), qui borde la rive droite de l’Oxus, pays de régime féodal, sans pouvoir central ; « chaque cité y avait son petit seigneur. Les gens y étaient mous et craignaient de faire la guerre ; ils reconnurent aussitôt les Ta Yue-tche pour leurs suzerains. » Les Yue-tche y insti-