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les Wou-souen et les Yue-tche. Une querelle éclate entre ces deux peuples, les Wou-souen, vaincus, se retirent sur le territoire des Hiong-nou et sollicitent leur protection. Traités avec faveur, grâce à la sympathie que leur jeune prince orphelin inspire au « chan-yu », le souverain des Hiong-nou, ils vont fonder un nouvel état sur les confins occidentaux du domaine des Hiong-nou, au nord de l’Iaxarte, vis-à-vis des champs cultivés du Fergana et de Samarcande. Les Yue-tche, enorgueillis par leur succès, provoquent les Hiong-nou ; mais le chan-yu Mao-touen (209-174) leur inflige une grave défaite, et son successeur, le chan-yu Lao-chang (173-160) remporte sur eux une victoire décisive, tue leur roi, et se fait une coupe de son crâne. Les Yue-tche pris de terreur abandonnent leur pâturages. Un groupe prend la direction du sud, et cherche un abri dans la région du Kökö-nôr, à la lisière des K’iang tibétains ; les Chinois les désignent sous le nom de Petits Yue-tche (Siao Yue-tche). Le plus grand nombre, les Grands Yue-tche (Ta Yue-tche) comme les appellent les Chinois, dévalent par une route encore indéterminée — peut-être par la vallée de l’Ili — et brusquement apparaissent sur la frontière septentrionale de la Sogdiane, où ils reprennent contact avec leurs anciens adversaires les Wou-souen. Les Wou-souen, solidement installés, ne leur permettent pas de s’arrêter, et la horde énorme, qui comptait plus de 100 000 archers montés, doit continuer sa chevauchée à l’ouest. Le royaume grec de Bactriane, qui a déjà vu les Wou-souen s’arrêter comme par miracle au nord du Iaxarte, échappe cette fois encore au danger ; son prestige est assez grand, cent ans après Diodote, pour retarder la ruée des barbares. Cependant, les