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un de leurs voisins arsacides, se décorer du titre de « philhellène », ami des Grecs. Un d’entre eux, Aspavarma, combine curieusement dans un nom hybride le mot iranien aspa « cheval » et le mot indien varma « cuirasse » terme que l’usage orthodoxe réserve dans l’Inde à la noblesse militaire dans les noms composés (type Indravarman, Sūryavarman, etc.) ; il est lui-même fils d’un Indravarman, au nom franchement indien ; et pour couronner le syncrétisme, il porte en indien le titre de stratega, transcription du grec stratêgos « général » qu’il accole au titre indien de Jayata « le victorieux ». Un monde étrangement curieux se réfléchit dans cette simple légende de monnaie ; nous en avons une image plus complète, mais fâcheusement suspecte, dans la Vie d’Apollonius de Tyane, rédigée par le rhéteur néo-pythagoricien Philostrate, à la requête de la Syrienne Julia Domna, veuve de l’empereur Septime Sévère, au début du iiie siècle de l’ère chrétienne. Apollonius, pythagoricien, magicien, thaumaturge, théosophe, passait pour avoir visité l’Inde et reçu des brahmanes les arcanes de leur sagesse qu’il avait communiqués à de rares initiés ; des chapelles de spirites l’adoraient avec une ferveur ésotérique. Caracalla, le fils de Julia Domna, lui avait élevé un temple en 215. Philostrate, qui se pique d’indiquer ses sources, prétend avoir fait usage des cahiers de Damis, compagnon de voyage et confident d’Apollonius. Destiné à un public de théosophes et de spirites, l’ouvrage est naturellement bourré de merveilleux ; il mérite une place d’honneur dans la série inépuisable des Merveilles de l’Inde, qu’avait inaugurée le médecin Ctésias. Il serait pourtant injuste de le rejeter brutalement ; l’Inde