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mort un envoyé chinois, et s’était enfui avec sa horde jusqu’au K’ang-kiu (Samarcande) qu’il avait occupé (49). Le Résident Général Kan Yen-cheou réunit des contingents dans tous les royaumes de son ressort, livra bataille aux envahisseurs et les extermina (36). La Chine devenait le symbole de l’ordre dans les régions qui semblaient vouées à l’anarchie. De proche en proche, elle avait étendu son influence jusqu’aux confins du monde indien. Allait-elle enfin pénétrer dans cette Inde encore à demi-fabuleuse dont Wou ti avait cherché si obstinément les accès ? Une démarche décisive la mit en demeure de choisir. Depuis Wou ti, l’Empire avait eu plusieurs fois des difficultés avec un royaume lointain que les Chinois désignaient sous le nom de Ki-pin ; plus tard, à l’époque où l’Inde sera mieux connue, le nom de Ki-pin sera tantôt appliqué à la ville de Caboul, tantôt au Cachemire. L’oreille chinoise distinguait mal entre Kapish, la Kapiçā du sanscrit, la Capissa des classiques, et Kāçmīr, le Kāçmīra du sanscrit, Kaspeira chez Ptolémée. Soit confusion, soit analogie des noms, le Ki-pin représente pour la géographie chinoise le pays de civilisation indienne situé au sud des grandes montagnes qui bordent l’Inde au nord-ouest. Peu de régions ont tenu un rôle aussi considérable dans le développement du bouddhisme en Chine. L’auteur des Annales des Premiers Han, Pan Kou (mort en 92 apr. J.-C.), conformément à son usage ordinaire, place en tête de sa notice sur le Ki-pin une description qu’il n’est pas sans intérêt de reproduire, ne fût-ce qu’à titre de spécimen :

« Le royaume de Ki-pin a pour capitale Siun-sien, située à 12 000 li de Tch’ang-ngan [la capitale impériale]. Il