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trente-cinquième runo

frémissant à travers les landes désertes de Pohja, au delà des vastes frontières de Laponie.

Une jeune vierge, à la poitrine ornée d’une fibule d’étain[1], s’avança à sa rencontre.

Kullervo, fils de Kalervo, arrêta aussitôt son fougueux étalon ; il appela la jeune vierge et lui dit d’un ton gracieux : « Viens, ô jeune vierge, dans mon traîneau : viens t’asseoir sous mes fourrures, pour manger mes pommes, pour casser mes noix ! »

La jeune vierge, à la poitrine ornée d’une fibule d’étain, lui répondit avec colère : « Je cracherais plutôt sur ton traîneau, misérable drôle ! Il fait froid sous tes fourrures, il gèle dans ton brillant traîneau ! »

Kullervo, fils de Kalervo, Kullervo, le jeune homme aux bas bleus, saisit la jeune vierge et la jeta de force dans son traîneau, dans son beau traîneau.

La jeune vierge exaspérée, la belle fille à la fibule d’étain, lui dit : « Délivre-moi de ce tourment, rends l’enfant à sa liberté ; épargne-lui, effronté que tu es, tes insolents propos, autrement j’enfoncerai d’un coup de pied la caisse de ton beau traîneau, je déchirerai la natte qui le garnit, je mettrai ton misérable équipage en pièces ! »

Kullervo, fils de Kalervo, Kullervo, le jeune homme aux bas bleus, ouvrit la cassette qui renfermait ses trésors, et il mit à découvert des parures superbes, des vêtements splendides, des bas brodés d’or, des ceintures et des fibules d’argent.

La vue des vêtements fit perdre l’esprit à la jeune fille, les parures l’étourdirent. L’argent est un rusé charmeur, l’or a un attrait irrésistible[2].

Et Kullervo, fils de Kalervo, Kullervo, le jeune homme aux bas bleus, se mit à caresser amoureusement la belle

  1. Voir page 33, note 1.
  2. « Hopea hukuttelevi,
    « Kulta kuihauitelevi. »

    Proverbe finnois ; on pourrait dire proverbe universel.