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trente-quatrième runo

Kullervo, fils de Kalervo, répondit : « Il m’est venu dans la pensée de me transporter dans d’autres pays, d’aller à Untamola, pour y punir le bourreau de ma famille, pour y venger les douleurs de mon père, les angoisses de ma mère, réduire les maisons en cendres, changer les habitations en étincelles de feu. »

La femme lui dit : « Ta famille n’est point éteinte, Kalervo n’est point mort[1] ; tu as encore un père dans la vie, une mère heureusement conservée dans le monde. »

« Ô chère, ô bonne vieille, ô femme secourable, dis-moi donc où je trouverai mon père, où je trouverai ma belle nourrice ? »

« Tu trouveras ton père, tu trouveras ta belle nourrice près des frontières de Laponie, sur les bords d’un lac poissonneux. »

« Ô chère, ô bonne vieille, ô femme secourable, dis-moi comment j’arriverai jusque-là, dis-moi la route que je dois suivre. »

« Il est facile pour toi d’y arriver. La route que tu dois suivre se trouve au détour d’un bois marécageux, sur les bords d’un fleuve. Marche un jour, marche deux jours, marche trois jours, puis tu prendras la direction du nord-ouest, jusqu’à ce que tu rencontres une montagne. Tu la tourneras à gauche ; et bientôt, à droite, t’apparaîtra un grand fleuve dont tu longeras la rive, dont tu franchiras les trois cataractes ; et, alors, tu atteindras la cime d’un promontoire, d’un écueil où se brisent les flots mugissants. Sur ce promontoire, sur cet écueil, se dresse une maison de pêcheur, et dans cette maison

  1. Il y a contradiction entre cette nouvelle donnée par la vieille femme et les événements racontés au debut de l’épisode de Kullervo, mais, peut-être ne faut-il pas prendre le premier récit à la lettre. Les grands poëmes populaires sont pleins de ces singularités. On pourrait aussi supposer que, par sa puissance magique, la vieille ou déesse des bois a tiré du tombeau la famille de Kullervo, et l’a reléguée dans cette demeure lointaine et inconnue, pour la soustraire à de nouveaux dangers.