Page:Léouzon le Duc - Le Kalevala, 1867.djvu/400

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
342
le kalevala

dans mon étable, un troupeau de loups dans ma maison. »

Kullervo, fils de Kalervo, répondit : « Si le misérable berger a commis une infamie, qu’as-tu donc fait, toi, misérable maîtresse, en me préparant un gâteau de pierre, en me pétrissant un pain de rocher ? Mon couteau s’est ébrèché contre la pierre, il s’est brisé contre le rocher, le couteau, seul héritage que j’avais reçu de mon père, le couteau qui avait appartenu à ma famille. »

La femme d’Ilmarinen dit : « Ah ! berger, cher berger, reprends les paroles que tu as prononcées ; rappelle à toi tes ensorcellements ; délivre-moi des dents du loup, des griffes de l’ours ! Je te parerai de beaux vêtements, je te nourrirai de beurre et de froment, je t’abreuverai de lait frais, je t’entretiendrai pendant un an, pendant deux ans, sans exiger de toi aucun travail.

« Si tu ne te hâtes de me délivrer, je sens que je vais bientôt mourir, que je vais être changée en poussière. »

Kullervo, fils de Kalervo, répondit : « Ah ! puisses-tu mourir ! Ce sera justice ! Ce sera un bonheur que tu sois réduite au néant ! La terre héberge ceux qui ne sont plus ; la sépulture abrite les morts ; les plus grands y trouvent une place, les plus fiers peuvent s’y reposer[1]. »

La femme d’Ilmarinen dit : « Ô Ukko, dieu suprême entre tous les dieux, viens ici avec ton plus grand arc, ton meilleur arc ! Arme-le d’un trait rapide comme l’éclair, d’un trait de cuivre brun à la pointe d’acier, et tire sur le fils de Kalervo ; transperce la chair épaisse de son épaule, renverse-le par terre, égorge l’homme misérable ! »

  1. « Kun on kuollet, kuolkosipa,
    « Kaotkosi, kun kaonnet !
    « Sia on maassa mennehillä,
    « Kalmassa kaonnehilla,
    « Maata mahtavaisimmanki,
    « Leveimmänki leväta. »