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introduction

qu’ils attribuent à un illustre et puissant géant de l’antiquité, père de plusieurs fils, parmi lesquels on comptait Wäinämöinen, Ilmarinen et Lemminkäinen. Suivant Castren, au contraire, d’accord avec le langage des runot, Kaleva est une épithète exprimant le plus haut idéal de l’héroïsme, qui s’applique indifféremment à tous les grands héros[1]. En effet, nous voyons les runot appeler Kaleva ou fils de Kaleva plusieurs personnages d’origine tout à fait différente, tels, par exemple, que Wäinämöinen, Wipunen, Lemminkäinen, Kullervo, etc. N’est-ce pas là une preuve évidente que le mot Kaleva joue, dans l’épopée finnoise, un rôle beaucoup plus vaste que celui d’un simple nom propre ? Ainsi, d’après cette interprétation, qui me paraît la mieux justifiée et la plus naturelle, Kalevala voudrait dire la patrie des héros, le monde héroïque en général. Les runot, toutefois, ne le prennent point dans ce sens idéal ; elles le localisent et en font spécialement le pays des trois héros principaux qu’elles mettent en scène, c’est-à-dire de Wäinä-

  1. La langue turque, qui appartient comme la finnoise à la famille des langues altaiques, possède un mot analogue a celui de Kaleva, le mot Aalep, qui signifie héros. Or, dans les légendes tatares, ce mot sert invariablement d’épithète à tous les personnages qui, de même que Wäinämöinen, Lemminkäinen, Kullervo, etc., dans le Kalevala, y jouent un rôle capital.