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le kalevala

tranquillement sur les vagues, tenant dans ses mains une ligne, au manche de cuivre, au fil de soie. Il pêchait le poisson et sondait les profondeurs de la mer. La mer a assez d’eau pour remplir deux coupes, et si on la mesurait bien rigoureusement, elle en fournirait peut-être encore assez pour une troisième[1].

Untamo se dit de nouveau : « Où faudra-t-il donc transporter ce garçon ? Où trouvera-t-il sa perte certaine ? Où rencontrera-t-il le coup de la mort ? »

Il ordonna à ses esclaves de rassembler une grande quantité de bouleaux hauts et durs, de sapins chevelus, de vieux pins résineux, afin de brûler le garçon, d’exterminer Kullervo.

Les arbres furent rassemblés, les bouleaux hauts et durs, les sapins chevelus, les vieux pins résineux. On y ajouta encore mille traîneaux d’écorce, cent brasses de jeunes rameaux ; et, quand le bûcher fut allumé, quand la flamme s’en élança furieuse, on y jeta le pauvre garçon.

Le bûcher brûla un jour, brûla deux jours, il brûla jusqu’à trois jours. Alors, on s’en approcha pour voir ce qu’était devenu Kullervo. Il était à genoux, au milieu du brasier, jouant avec les charbons et les attisant avec un croc en fer. Le feu n’avait pas même effleuré la pointe de ses cheveux, il avait respecté jusqu’au plus léger duvet de sa chair.

Untamo, furieux, se demanda encore : « Où faudra-t-il donc transporter ce garçon ? Où trouvera-t-il sa perte certaine ? Où rencontrera-t-il le coup de la mort ? »

On pendit Kullervo à un arbre, on le hissa jusqu’à la cime d’un chêne.

Deux nuits, trois nuits s’écoulèrent et autant de jours. Untamo réfléchit profondément.

« Il est temps de savoir si Kullervo a succombé, s’il a trouvé la mort sur la potence ! »

  1. Proverbe finnois signifiant la grande quantité d’eau que contient la mer.