sa mère manqua de lait, lorsqu’elle n’eut plus de mamelles ?
« Le serpent allaita le Froid, le serpent le nourrit avec ses mamelles maigres et sèches, ses mamelles vides et ridées ; le vent du nord le berça, le souffle glacé l’endormit, sur la mousse d’un marais horrible, au milieu des sources bondissantes[1].
« Ainsi naquit, ainsi fut élevé le garçon dépravé, le vicieux compère, mais il n’avait point encore de nom ; on donna au misérable le nom de Froid[2].
« Alors, il se vautra dans les enclos, il se balança aux branches des arbres ; pendant l’été, il dormit au fond des sources, il séjourna au sein des vastes marais ; pendant l’hiver, il régna dans les bois de sapins, il trôna parmi les hauts pins, il gronda parmi les bouleaux et les aulnes ; il dessécha les rameaux, il nivela les plaines[3], il dépouilla les forêts de leur feuillage, les bruyères de leurs fleurs, il dispersa les pommes des pins, il fendit les sapins.
« As-tu donc déjà assez grandi, ô Froid, es-tu donc devenu assez fort et assez puissant, toi qui voudrais t’attaquer à moi, qui voudrais me faire gonfler les oreilles, me torturer les pieds et les ongles des doigts ?
« Je te défie de me geler le corps, de me roidir les membres : je mettrai du feu dans mes bas, des charbons
- ↑
« Kyyhyt Pakkasen imetti,
« Kyy imetti, Käarme syötti
« Nännillä nenattömillä,
« Utarella uuttomalla,
« Poljaistuuli tuuitteli,
« Vilu ilma viiaytteli
« Pahoilla pajupuroilla,
« Hereillä hetiehilla. » - ↑ Dans les runot, le froid est ordinairement personnifié ; il est, par conséquent, tout naturel qu’on lui donne un nom propre. Ce nom (en finnois, Pakkanen) viendrait-il de Pakko, force impérieuse, angoisse, douleur ?
- ↑ Pendant l’hiver, le sol des pays du Nord est entièrement nivelé, de sorte que les traîneaux y circulent aussi bien sur la terre ferme que sur les lacs, les marais et les détroits.