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vingt-cinquième runo

près des pots d’hydromel. Nous y trouvons à notre portée un golfe plein de truites, des filets pleins de saumons ; et les vivres n’y prennent point fin sous la dent des convives, et l’abondance de la boisson y défie la soif des buveurs[1].

« Il est bon pour les hommes, il est doux pour les femmes de se rencontrer ici. On n’y mange point avec chagrin, on n’y passe point le temps dans les angoisses ; on y mange avec joie, on y passe le temps agréablement, durant la vie de l’hôte, durant la vie de l’hôtesse.

« Qui, maintenant, commencerai-je à célébrer ? sera-ce l’hôte ou bien l’hôtesse ? Les héros des temps passés commençaient toujours par l’hôte, par celui qui a tiré la maison du marais, qui l’a fait surgir du bois sauvage[2] ; qui a coupé les grands pins avec leurs racines, les sapins branchus avec leurs couronnes, et qui les a apportés dans un lieu bien choisi, pour servir à la construction de la vaste habitation, de la belle maison de famille ; celui qui a taillé ses murs dans la forêt, ses poutres sur le versant des hautes collines, ses escaliers dans les rochers, les planches de son toit dans les sapinières ; qui a recueilli l’écorce et la mousse destinées à la couvrir, dans les hautes plantations de putiers, dans les espaces marécageux.

« La maison a été construite avec une habileté merveilleuse ; elle s’élève à sa vraie place. Cent hommes, mille hommes ont été employés pour tailler les poutres du toit, pour joindre ensemble les solives du plancher.

« Et lorsque notre hôte, notre bon hôte, construisait la maison, souvent ses cheveux ont été agités par le vent, secoués par la tempête ; souvent il a laissé ses gants parmi les rochers, son chapeau suspendu à une branche

  1. « Joist’ei syöen syömät puutu,
    « Juoen juomiset vähene. »

  2. C’est-à-dire qui a tiré des bois et des marais les matériaux nécessaires pour construire la maison.