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vingt-cinquième runo

lui donner le foin ; l’agneau du printemps a bêlé après celle qui devait augmenter sa pâture[1].

« Déjà, pendant toute cette journée, déjà, pendant tout le jour précédent, les vieillards sont restés assis près de la fenêtre, les enfants ont couru sur les rivages, les filles se sont tenues debout le long des murs, les garçons sont demeurés aux portes du vestibule, attendant la jeune épouse, la gracieuse fiancée.

« Salut à toi, ô enclos, avec toutes tes richesses, cour intérieure avec tes hôtes ; salut, hangar, avec tout ce que tu renfermes, avec tous ceux qui t’habitent ; salut, vestibule, dans toute ta plénitude ; salut, toit d’écorce de bouleau, avec toute ta famille ; salut, chambre de la maison, avec tout ce que tu contiens, plancher aux mille solives, avec tes enfants ; salut, ô lune, salut, ô roi[2], salut, jeune cortége de noces ! Jamais, dans les temps passés, jamais, ni hier, ni un autre jour, on n’avait vu, dans ces lieux, un cortége aussi fier, aussi imposant, une troupe aussi splendide.

« Ô fiancé, mon cher frère, lève le tissu rouge, le voile de soie, et montre-nous cette hermine que tu as recherchée pendant cinq ans, après laquelle tu as soupiré pendant huit ans[3] !

« As-tu amené l’objet que tu désirais ? Ne désirais-tu pas amener un beau coucou, une blanche vierge choisie dans le pays, une gracieuse jeune fille de l’autre côté de la mer ?

« Mais, qu’ai-je besoin de t’interroger ? Je vois de mes

  1. Nous avons, autant que possible, traduit littéralement tous ces passages. Le sens en est facile à saisir, mais la forme en est d’une bizarrerie déconcertante. C’est là, du reste, un curieux exemple de cette puissance de personnification qui distingue le génie de la poésie finnoise. Elle prodigue les actes et les sentiments humains avec une audace qui ne recule devant rien.
  2. « Terve Kuu, terve Kuningas ! » La runo entend-celle par la lune (Kuu) la jeune épouse, et par le roi (Kuningas) le jeune époux ?
  3. C’est-à-dire lève le voile qui cache le visage de la jeune femme, afin qu’on puisse l’admirer.