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vingt-deuxième runo

« Ô fiancé, mon cher frère, tu as attendu longtemps, attends encore ! Celle après laquelle tu soupires, celle qui doit être la compagne de ta vie n’est pas encore prête : sa chevelure n’est tressée qu’à moitié, il faut tresser l’autre moitié.

« Ô fiancé, mon cher frère, tu as attendu longtemps, attends encore ! Celle après laquelle tu soupires, celle qui doit être la compagne de ta vie n’est pas encore prête : elle n’a passé qu’une manche de sa robe, il faut qu’elle passe l’autre.

« Ô fiancé, mon cher frère, tu as attendu longtemps, attends encore ! Celle après laquelle tu soupires, celle qui doit être la compagne de ta vie n’est pas encore prête : elle n’a chaussé qu’un seul pied, il faut qu’elle chausse l’autre.

« Ô fiancé, mon cher frère, tu as longtemps attendu, attends encore ! Celle après laquelle tu soupires, celle qui doit être la compagne de ta vie n’est pas encore prête : elle n’a ganté qu’une seule main, il faut qu’elle gante l’autre.

« Ô fiancé, mon cher frère, tu as longtemps attendu, et tu ne t’en es point lassé. Maintenant, celle après laquelle tu soupires, celle qui doit être la compagne de ta vie est prête à te suivre.

« Va donc, Ô jeune fille achetée[1], va, ô colombe vendue ! Maintenant, le moment de ton union est proche, l’heure des adieux va sonner ; car celui qui doit t’emmener est à tes côtés, celui qui doit t’enlever est près de la porte ; l’étalon frémit sous le mors, le traîneau attend la jeune fille.

« Puisque tu as aimé l’argent, puisque tu as été

  1. Chez les anciens Finnois, le mariage était une sorte de marché, dans lequel le jeune homme, qui seul apportait une dot, était censé ainsi acheter sa femme. Toutefois, cet usage trouvait un correctif dans la liberté laissée à la jeune fille d’accepter ou de refuser le prétendant qui demandait sa main. Les runot nous en ont déjà offert un solennel exemple.