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le kalevala

lèbre à cause de ses grandes expéditions maritimes ; sa mère plus célèbre encore à cause des grands pains qu’elle a fait cuire, des pains de froment qu’elle a préparés pour servir aux hôtes étrangers.

« Voici comment ton bien-aimé a su, voici comment l’étranger a appris qu’une jeune fille était née, qu’une belle vierge florissait dans ces demeures. Un jour, un matin, au premier crépuscule, je passais devant la maison, et je vis la fumée tourbillonner au-dessus du toit, une fumée épaisse et noire s’élever de la maison renommée de la jeune fille. Et la jeune fille, elle-même, était occupée à moudre avec un moulin à mains. Le moulin chantait comme un coucou, la manivelle comme une grive, le tamis comme un serin, la pierre grinçait comme si elle eût broyé des perles.

« Un autre jour, je longeais un champ : la jeune fille s’y trouvait au milieu des fleurs, cherchant des herbes de teinture, et, dans une chaudière, elle préparait de la couleur rouge, elle faisait bouillir de la couleur d’or.

« Une troisième fois, je passais sous les fenêtres de la jeune fille, et je l’entendis tisser. Sa navette allait et venait, rapide comme l’hermine, à travers les rochers, ses fuseaux bruissaient, comme la pie, au milieu des arbres, son ensouple roulait agile, comme l’écureuil dans les branches. »

La mère de famille de Pohjola dit : « Justement, ô ma fille, ne te l’ai-je pas toujours dit : ne chante point dans les bois de sapin, ne chante point dans les vallées, ne montre point la courbe de ton cou, ni la blancheur de tes bras, ni la beauté de ta jeune poitrine, ni les autres charmes de ta personne !

« Durant ce long automne, durant tout cet été, et ce fugitif printemps, et cette saison des semences, je te l’ai dit, je te l’ai déclaré : construisons-nous une demeure mystérieuse, une petite chambre avec des fenêtres invisibles, où la jeune fille puisse tisser, sans être entendue