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le kalevala

La mère de famille de Pohjola dit : « Ô simple et naïve enfant, tu te donneras au forgeron Ilmarinen pour servir d’appui à son front écumant de sueur, pour lessiver ses draps grossiers, pour nettoyer sa tête. »

La jeune fille répondit : « Je ne prendrai point le vieux Wäinämöinen, je ne deviendrai point le soutien de l’homme décrépit ; incommode serait le vieillard, ennuyeux l’homme décrépit. »

Le vieux Wäinämöinen arriva le premier. Il tira son rouge bateau, il poussa sa barque de vadmel sur des rouleaux de fer, sur des troncs de cuivre. Puis il s’empressa de se diriger vers la maison, il entra sous la voûte du toit, et sur le plancher, devant la porte, sous la poutre, il parla ainsi : « Viendras-tu à moi, jeune fille, pour être mon amie éternelle, pour être l’épouse de ma vie, la colombe qui roucoulera à mes côtés ? »

La belle jeune fille de Pohja répondit sans hésiter : « As-tu déjà fabriqué un bateau, as-tu déjà construit un grand navire avec les débris de mon fuseau, les fragments de ma navette ? »

Le vieux Wäinämöinen dit : « Oui, j’ai fabriqué un bon bateau, j’ai construit un remarquable navire, un navire ferme dans la tempête, un navire qui, sous les coups des vents orageux, fend sûrement les vagues et franchit les détroits ; il s’élève comme une bulle d’eau et plonge comme une feuille de nénuphar, à travers la mer de Pohjola, sur les vagues aux couronnes tourbillonnantes. »

La belle jeune fille de Pohja dit : « Je fais peu de cas d’un homme de mer, d’un héros qui voyage à travers les flots ; le vent lui trouble la tête, l’orage lui brise le cerveau. Ainsi, je ne puis point te suivre, je ne puis point me donnerà toi, pour être ton amie éternelle, pour être la colombe roucoulante à tes côtés, pour préparer ton lit, pour mettre en bel ordre l’oreiller de ta tête. »