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dix-huitième runo

toyer, grand le troupeau que j’ai à soigner, lourde la pierre avec laquelle je dois moudre le grain, fine la farine que je dois tamiser. Oui, la pierre est grande, mais la farine est fine ; et celle qui moud le grain est elle-même peu vigoureuse. »

Le gardien de la porte du château continuait d’abayer, le chien gris murmurait sourdement. Le père de famille de Pohjola dit : « Femme, va voir pourquoi le chien gris a aboyé, pourquoi le gardien de la porte du château à donné de la voix. »

La femme répondit : « Je n’ai pas le temps maintenant : grande est la maison que j’ai à nourrir, le repas que j’ai à préparer ; épais le pain que j’ai à mettre au four, le gâteau que j’ai à pétrir. Oui, le pain est épais, mais la farine est fine, et celle qui pétrit et met au four est peu vigoureuse. »

Le père de famille de Pohjola dit : « Les femmes sont toujours pressées, les filles sont toujours empêchées, lors même qu’elles se rôtissent sur la dalle du foyer, qu’elles restent étendues dans le lit. Garçon, va toi-même voir ce qui arrive ! »

Le garçon répondit : « Je n’ai pas le temps : il faut que j’aiguise une hache, que j’abatte un énorme tronc, que je coupe en éclisses une grande pile de bois, que je prépare de légers éclats de bois. Oui, la pile de bois est grande, les éclats de bois sont fins, et le bûcheron lui-même est faible et sans vigueur. »

Le gardien du château continuait d’aboyer, le chien sauvage grondait, le surveillant de l’île murmurait, accroupi sur le bord du champ et décrivant des cercles avec sa queue.

Le père de famille de Pohjola dit : « Notre chien gris n’aboie pas en vain, le vieux ne donne pas de la voix, ne grogne pas sans raison, aux sapins de la forêt. »

Et il sortit lui-même de sa demeure, il alla voir ce qui se passait à l’extrême limite du champ, vers le chemin le plus éloigné.