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dix-huitième runo

grand arc, ses fortes flèches d’acier armées de plumes, et son chien noir l’accompagnait, rôdant autour du rivage et flairant chaque pierre. Où vas-tu, ô Wäinämöinen, où te diriges-tu, dans tous les cas ? »

Le vieux Wäinämöinen répondit : « Je vais dans les grandes batailles, dans les ardentes mêlées, là où le sang bouillonne jusqu’au jarret, où le sang rouge monte à la hauteur du genou.

Annikki, la jeune fille ornée d’une fibule d’étain, dit : « Je sais aussi de quelle manière on se rend au combat. Lorsque, jadis, mon père partait pour la guerre, pour les ardentes mêlées, il avait avec lui cent rameurs, et mille hommes se tenaient assis, prêts à l’action. Les arcs se dressaient à l’avant de son navire, et sur les bancs étincelaient les glaives et les lances. Dis-moi donc enfin la vérité sans détour : où vas-tu, ô Wäinämöinen, où diriges-tu ta course, Suvantolainen ? »

Le vieux Wäinämöinen répondit : « Viens, à jeune fille, dans mon bateau ! Là, je te dirai la vérité sans détour. »

Annikki, la jeune fille ornée d’une fibule d’étain, dit d’un ton moqueur : « Que la tempête fonde sur ton bateau, que les vents se déchaînent contre lui ! Je le ferai chavirer, je le coulerai à fond, si tu ne cesses tes mensonges, si tu ne m’avoues enfin, avec franchise et vérité, où tu diriges ta course ? »

Le vieux Wäinämöinen répondit : « Si jusqu’à présent, j’ai quelque peu usé de feinte, je confesserai maintenant la vérité tout entière. Je me suis mis en route pour aller demander la main d’une jeune fille, dans la sombre Pohjola, dans la nébuleuse Sariola, dans ce pays où l’on dévore les hommes, où l’on précipite les héros dans la mer. »

Annikki, la fille de la nuit, la vierge du crépuscule, comprit que, cette fois, Wäinämöinen avait renoncé au mensonge, et qu’il lui avait confessé la vérité, la droite vérité. Alors, elle laissa là les objets qu’elle