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introduction

instance, quelque promesse qu’on leur fasse, ils s’y refusent obstinément. C’est seulement à la suite d’un long séjour parmi eux, et après être entré peu à peu dans leur intimité, que l’on peut parvenir à vaincre leur résistance. Lönnrot, en sa qualité de médecin, avait pour cela plus de facilité que tout autre : il les soignait dans leurs maladies, et, en retour de ses soins, ils n’osaient refuser de lui chanter les runot.

Dans les gouvernements d’Archangel et d’Olonetz, où, depuis le dixième siècle, la population, d’origine finnoise, est soumise à la Russie, dont elle a pris la religion et en partie les usages, les bardes populaires font des runot un objet de commerce : ils les chantent à qui les paye. Il en est de même en Ingrie, mais avec plus d’âpreté ; car tandis que, partout ailleurs, les paysans acceptent, sans difficulté, en échange de leurs runot, des livres par exemple, des rubans, etc., les Ingriens, rendus plus avides par le voisinage de Saint-Pétersbourg et la fréquentation de ses marchés, ne chantent que contre argent comptant.

À ces obstacles, il faut joindre la suspicion dans laquelle, aux yeux de paysans ignorants et superstitieux, tombent souvent les collecteurs de runot. On les prend pour des espions, des malfaiteurs.