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le kalevala

Elle adapta la chair à la chair, les os aux os, les jointures aux jointures, les veines aux veines.

Et après avoir lié avec soin les veines, elle dit : « Ô déesse des veines, Suonetar[1], belle femme, toi qui, avec ton fuseau de cuivre, ton rouet de fer, files si habilement les veines, viens ici, car on a besoin de ton secours, viens ici, car on t’appelle ! Apporte sous ton bras un faisceau de veines, une masse de chair, afin de nouer ensemble les extrémités des veines, au fond des plaies béantes, des trous sanglants des blessures !

« Et si cela ne suffit point, il est dans les régions de l’air une jeune vierge ; elle se balance dans une barque de cuivre éclatant, dans un bateau au rouge gouvernail. Viens, ô jeune vierge de l’air, descends des hauteurs azurées ; lance ta barque à travers les veines, à travers. les jointures, parcours l’intérieur des os, toutes les fractures des articulations[2] !

« Remets chaque veine à sa place ; arrange, unis, comme il convient, les grosses veines, les artères épaisses ; croise, les unes sur les autres, les petites veines et les nerfs délicats !

« Prends, ensuite, ta fine aiguille à la pointe d’étain, passes-y un fil de soie, et couds les veines de manière à ce qu’elles ne puissent plus se disjoindre !

« Et si cela ne suffit point, viens toi-même, ô Dieu révélé, bride tes poulains, attèle tes coursiers, et dirige ton beau traîneau à travers les os, à travers les jointures, à travers les chairs, les veines pendelantes ; unis les chairs aux chairs, les veines aux veines ; verse de l’argent dans les trous des os, de l’or dans les fissures des veines !

« Partout où la chair est lacérée, que la chair renaisse !

  1. Suonetar est une des déesses de la santé, ayant pour attributions spéciales la confection et l’entretien des veines. Suonetar a pour adersaires Kivutar, déesse des maladies, et Wammatar, déesse des douleurs.
  2. Il s’agit ici de l’une de ces vierges dont la mythologie finnoise peuplait les airs, et qu’elle donnait comme suivantes à Ukko. On leur attribuait, en général, un pouvoir bienfaisant.