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le kalevala

un château de pierre ; et chacun de ces châteaux avait six fenêtres d’or. Je me hissai contre le mur et regardai à travers ces fenêtres. Le père et la mère de Tapiola, Tellervo, leur jeune et gracieuse fille, tous les habitants de leur maison étaient revêtus d’habits d’or, de parures d’argent ; la mère bien-aimée des bois avait, en outre, au bras, un bracelet d’or ; aux doigts, des anneaux d’or ; sur la tête, une couronne d’or ; dans les cheveux, des tresses d’or ; aux oreilles, des pendants d’or ; au cou, un collier de belles perles.

« Ô bienveillante mère des bois, ô mère de Metsola[1], douce comme le miel, laisse là tes souliers de paille, tes chaussures d’écorce de bouleau ; quitte tes haillons sordides, ta chemise de tous les jours, et revêts les habits du bonheur, la chemise de la générosité, tandis que je reste dans la forêt à courir apres la proie ! Il m’est pénible, il m’est dur de demeurer ainsi toujours les mains vides, de ne pas recevoir de toi le moindre présent. Oui, triste est le soir que ne visite point la joie, long le jour qui n’apporte aucun butin[2].

« Ô vieillard des bois, à la barbe sombre, au bonnet de sapin, au manteau de mousse, couvre, maintenant, les forêts de tissus de lin, les champs arides de drap, les érables de vadmel, les aulnes de vêtements d’amour ; revêts les pins d’argent, les sapins d’or ; entoure-les d’une ceinture de cuivre, d’une ceinture d’argent ; orne les bouleaux de fleurs d’or ; suspends autour des troncs d’arbres des franges d’or ; traite-les tous comme tu les traitais jadis ! Aux meilleurs temps de ta vie, les branches des sapins brillaient comme la lune ; les cimes des pins resplendissaient comme le soleil ; les arbres distillaient des parfums doux comme le miel ; les bruyères bleues

  1. Personnification de la forêt : on l’appelle douce comme le miel ou riche de miel, parce qu’elle prend soin du miel qui abonde dans les forêts, dont il est, suivant le langage des runot, la bière par excellence.
  2. Proverbe finnois.