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v
introduction

des Finnois un trouble immense. Quel nouvel avenir allait s’ouvrir devant eux ? Quelle attitude devraient-ils prendre vis-à-vis de leur nouveau maître ? Certes, la Finlande ne pouvait brusquement abdiquer ses souvenirs ; elle ne pouvait, sans se mentir à elle-même, renier ce glorieux pays dont elle avait si longtemps partagé les destinées. Et cependant, par suite des événements accomplis, il lui était interdit d’afficher hautement ses sentiments ; elle devait les refouler au fond de son cœur.

D’autre part, la Russie, qu’elle avait si vaillamment combattue, ne lui apparaissait qu’à travers les éclats fulgurants de la conquête ; elle l’éblouissait de sa force ; mais, sans lui offrir, au point de vue intellectuel et moral, d’élément d’affinité commune propre à exercer sur elle une attraction souveraine. Ainsi, avec le temps, la Finlande pourrait bien s’estimer fière, heureuse même de faire partie d’un grand empire ; mais cette solidarité, cette assimilation entre les deux peuples, qui avaient caractérisé son union avec la Suède, ne présideraient évidemment jamais à son union avec la Russie. Elle y était tombée, si nous pouvons nous exprimer de la sorte, comme l’or dans un creuset sans flamme, incapable de s’y fondre et de s’y transformer.