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L’ARCHITECTURE DE LA RENAISSANCE.

agi avec le plus d’intensité, nous voulons dire celles de Venise et de Milan. On n’a pas oublié, en effet, que, dans la dernière ville, au temps de Ludovic le More, Bramante s’était cru obligé de tracer l’ouverture de ses fenêtres suivant un arc brisé.

Avec la suprématie artistique de Rome, tout cela change rapidement. Les ordres d’architecture prennent de l’ampleur, enveloppent de toutes parts la construction et tiennent lieu de tout ornement. Où ils manquent, les bossages, déjà usités d’ailleurs au xve siècle, les remplacent. La décoration délicate des quattrocentistes cesse d’être à l’échelle de ces monuments où la majesté vise à tenir lieu de la grâce et du charmant abandon. Tout au plus les Raphaël, les Palladio, les Sansovino trouvent-ils à loger quelques motifs entre les triglyphes de leurs entablements doriques ou dans leurs frises ioniques et corinthiennes. Pour certains monuments, le chapiteau et le modillon corinthien sont les seules sculptures empruntées au règne végétal ; souvent on se passe même des ordres corinthien et ionique ; le dorique sans triglyphes et le toscan réglementé par Vignola obtiennent la préférence. Il est à observer que c’est le prince des sculpteurs modernes, Michel-Ange, qui, par son amour du colossal, a contribué le plus à engager l’architecture dans cette voie. La statuaire a succédé à la sculpture décorative ; seulement des statues ne sont pas toujours faciles à placer ; dans un édifice privé, elles peuvent être ridicules.

Quel que soit le jugement que l’on porte sur les transformations indiquées, il faut reconnaître que les qualités d’invention n’ont presque jamais manqué aux