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doit pas pleurer si désespérément dans un autre endroit : je ne me souviens pas, du temps où j’habitais chez mes parents, d’avoir rencontré sous l’ondée, un arbre aussi noir, aussi désolé que le marronnier de la cour.

Les enfants sont arrivés, la plupart nu-tête et mal chaussés ; les uns, pareils à des épouvantails, avec leurs vêtements de guingois collés sur leur carcasse maigre, et des égouttures au bout des doigts et au bout du nez ; les autres, des petits tas informes, comparables aux vieux paillassons dont les balayeurs municipaux se servent pour barrer les ruisseaux. Des tignasses aquatiques rappellent la race bâtarde de certains vilains chiens d’aveugles.

Les premiers entrés ont marqué leurs pas juteux sur le parquet, de la barrière aux patères et des patères aux bancs ; bientôt, un chemin de boue s’est dessiné dans le préau.

À dégrafer les capuchons, j’ai la peau des doigts frisée comme après une lessive.

Tiens ! voici Louise Guittard ; elle me convie à rire des perles qui pendent aux oreilles des garçons.

Mais je m’agace de la stupide et pernicieuse manie des foulards. Il semble, dans le peuple, qu’un foulard dispense de donner à un enfant une coiffure, des chaussures, un vêtement suffisant ; du moment qu’il a un chiffon au cou, il est bien soigné, il n’attrapera pas de mal !

Attention ! Là-bas, sur les bancs, s’élève une rumeur que je connais bien : la rumeur des acci-