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reproductions de fêtes officielles, apothéoses de gouvernants, accidents, crimes, exécutions.

Les enfants jouent à la guerre, au cheval, au voleur : ils reproduisent dans leurs jeux leur destinée d’obéir, d’être exploités et malmenés ; et, la conception du mieux, le besoin d’art, ne peut élever chacun qu’au rêve de devenir, à son tour, celui qui commande, celui qui exploite ou qui frappe : l’officier, le cocher, le gendarme.

Mme Paulin elle-même paraît toute singulière, toute « marchande de printemps ». Elle me fait penser aux duègnes du théâtre classique.

Dès le premier jour, elle m’a voué une sincère affection : maintenant ses égards s’accentuent, elle me soigne, elle me couve, dirai-je, comme une mère ayant un fils à marier.

Et je me rappelle cette invitation de jadis : Venez donc, le dimanche : dans ma maison, il y a des jeunes gens, on s’amuse ». Elle m’avait même cité le fils de sa concierge : « Un garçon qui a fréquenté beaucoup les cours du soir — et de plus, réformé du service militaire pour un motif qui n’empêche pas les sentiments ».

Elle avait eu l’intelligence de ne pas insister. Une nouvelle lubie serait vraiment comique !

Dans tous les cas, elle m’a demandé — négligemment, trop négligemment, — si je ne pensais pas à me marier.

J’étais d’assez bonne humeur :

— Pourquoi pas ? Je suis comme les autres.