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enfants qui ont de l’estomac et qui digèrent facilement les fortes réprimandes, les premières sont le fait des délicats, émotionnés par des riens.) Je ne demande pas la punition proportionnelle des grosses fautes : je souhaite la décharge des peccadilles.

À la récréation de ce matin, j’ai observé un petit nouveau qui, nécessairement, avait la sensation d’être perdu dans l’école étrangère, — pour avoir retiré sa ceinture, on l’a mis, selon l’usage, en pénitence, cinq minutes contre le mur de la cour, face au marronnier, en lui disant : « Tu vas rester là tout seul, personne ne s’occupe plus de toi. » Punition excessive parce que l’enfant était nouveau. Pendant quelques instants il a connu l’infini désespoir de l’abandon total. Contre son mur, il faisait penser à un aveuglé, à un asphyxié : il tâtait le vide à mains tremblantes, il ouvrait le bec, palpitait, affolé d’être tout seul. Sait-on combien un enfant se laisse suggestionner ? Combien son imagination le peut halluciner ? Les désolations sans cause sont peut-être les plus atroces.

Mme Galant détient le record des punitions regrettables. C’est une maîtresse fanatiquement dévouée à l’enseignement — je ne dis pas dévouée aux enfants — elle emploie une pédagogie de dévote : implacable, sans pardon. Quand elle a annoncé une punition, elle s’en souvient, fût-ce trois jours après, et elle possède cette extraordinaire faculté de pouvoir sévir comme cela, à froid.

Beaucoup d’élèves ont la terreur du sergent de ville, du commissaire. Ces croquemitaines lui ser-