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L’inspection de propreté. Le froid a mangé la crasse des mains comme il a supprimé la boue de la rue.

La conduite aux cabinets. Pénible nécessité ; un vent griffeur souffle dans la cour. La misère des accoutrements se révèle : des loques innommables servent de chemises, de jupons, de caleçons. Pitié ! des innocents n’ont même pas chaud à leur pauvre ventre ! Mes pauvres petits ! les garçons… on ne leur trouve plus rien ; des poupées, dont le dessous n’est pas assez protégé, tournent un regard désespérant, comme lointain et anxieux.

La directrice m’a laissé sa classe.

— Faites-leur exécuter des mouvements de bras pour les réchauffer ; j’ai mes écritures de décembre à terminer.

J’entends la normalienne :

— Puisque vous avez trop froid pour écrire, si vous êtes raisonnables, je vous raconterai encore « la Mésange »… Adam !

Je me suis ensoleillée de contentement et de désir, comme les élèves de Mademoiselle. « La Mésange ! » c’est une vraie récompense d’écouter cette histoire d’oiseaux qui ont des petits.

Instantanément, j’ai été ranimée ; toutes mes mauvaises idées sur l’école ont été bannies. Je n’avais plus pensé à « la Mésange ! » Dieu merci, je me trompais : dans le rôle des parents domine la beauté, un sublime fulgure qui annule toutes les ombres, et l’on ne peut décemment enseigner aux enfants à critiquer la famille ; il faut bien leur