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la maternelle

sans âge, à traits grecs exagérés, grossis, couperosée par les liqueurs chères aux laveuses.

Elle détenait un air parfait de « parent d’élève » ; elle était bien dans la fonction, rien de faux ne jurait dans son accent, ni dans sa pose ; c’était bien la mère, avec son droit calme et supérieur de diriger l’enfant, droit sacré, fortifié, éternisé par l’ensemble des institutions et des idées ; et elle s’appuyait solidement, normalement, sur l’école.

La directrice obligée d’acquiescer hochait la tête vers l’enfant.

Et, dans le même instant, juxtaposée à la puissance de la mère Doré, j’ai revu la sérénité, la fascination irrésistible de la directrice, de la normalienne, de Mme Galant, haussées dans leur chaire et proclamant à leurs troupes :

« Vous devez obéissance à vos parents — vous devez suivre l’exemple de vos parents ; tout ce que vos parents disent, ordonnent et font est bien dit, bien ordonné, bien fait, car ils incarnent la sagesse éprouvée en dehors de laquelle vous seriez perdus. »

Eh, oui ! les devoirs envers la famille, devoirs de soumission et de conformisme, c’est la leçon de tous les jours, c’est l’anneau de départ qui commande l’enchaînement du reste.

Cependant, la mère Doré s’en allait ; on criait les noms d’autres enfants, je donnais les capuchons, les paniers.

Je sentais comme des griffes qui labouraient en moi cette notion : Mais non ! les parents ne sont pas parfaits, bien au contraire ; ce qu’ils font est