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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

l’esprit politique et philosophique français, au lendemain de Sedan, et la préparation de la Revanche. Son influence fut autrement forte et profonde, sur les hommes de ma génération, que celle, toute en surface, de Déroulède. Il ne faut donc pas s’étonner si, à la fin du siècle dit « des lumières » et, en réalité, de l’imbécillité politique et philosophique, c’est le nom de Déroulède, excellent homme et orateur entraînant, mais cerveau vide, qui est au fronton de la gratitude nationale, et non celui de Mme  Edmond Adam, coupable d’avoir arraché le masque du rhéteur génois Léon Gambetta.

Ainsi le développement formidable de la presse, dans le dernier tiers du XIXe siècle, loin de servir la cause de l’intelligence et de la raison, c’est-à-dire, en politique, celle de l’ordre, a-t-il servi plutôt celle de la confusion mentale et de l’argent, c’est-à-dire, en somme, de l’anarchie. Quand arriva la guerre franco-allemande de 1914, on fut effrayé du nombre de journaux convaincus, ou soupçonnés, de s’appuyer sur des capitaux allemands et de suivre les directives de l’agresseur. Une telle perversion était cependant la conséquence directe du détachement progressif de la presse, quotidienne et périodique, quant aux intérêts permanents du pays, de son asservissement progressif à de tout autres causes que celle du bien général, en un mot de sa dénationalisation.