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STUPIDITÉ DE L’ESPRIT POLITIQUE.

Quant au remède, préconisé par quelques serins, qui consisterait à prendre des ministres en dehors du parlement, et selon leur compétence, il a donné, les quelques fois où il fut appliqué, des résultats pires encore que l’autre système. Il arrive, en effet, ceci, que ces ministres improvisés, ignorants du jeu parlementaire, ou commettent une énorme gaffe qui annihile d’emblée leur autorité, ou se confient à un lascar d’assemblée quelconque, qui abuse de leur naïveté et les entraîne aux pires compromissions. Exemple : combien d’excellents amiraux et de remarquables généraux ont vu leur prestige amoindri par un passage au ministère de la Marine ou de la Guerre, où leur inhabileté parlementaire donna l’injuste impression d’une inhabileté tout court, où leur manque de caractère politique donna l’injuste impression d’un manque de caractère tout court. Combien de fois n’est-il pas arrivé (cas de Gallifet notamment, dans le cabinet Waldeck) que le ministre militaire de la Guerre, traité immédiatement, par les gauches, de baderne et d’assassin, ou de traîneur de sabre, au choix, ait voulu prouver à ses détracteurs sa largeur d’esprit, ce, au détriment de l’armée. L’écueil est classique.. Même observation quant à l’amiral ministre. Le service le plus important de tous, qui est celui de la Défense nationale, peut ainsi se trouver gravement compromis par le besoin qu’éprouve son chef militaire et politique de faire des avances et mamours à ses pires ennemis, ou de les amadouer par des concessions inopportunes et en lâchant quelque chose,