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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

politique. Tels quels, ces syndicats eurent d’abord contre eux les libéraux, partisans acharnés de l’individualisme esclavageur (puisqu’il est clair qu’un ouvrier isolé est sans recours devant son patron). Ces libéraux entraînèrent avec eux de nombreux conservateurs, ignorants des instructions politiques si sages du comte de Chambord, et aux yeux inclairvoyants de qui la désorganisation du monde des travailleurs était une condition de sécurité sociale, alors qu’elle est précisément le contraire. Pas plus que les ouvriers ne comprenaient leur véritable intérêt, qui est de développer le syndicalisme jusqu’au corporatisme (excusez le vilain mot, pour la belle chose) intégral et complet, les conservateurs ne comprenaient le leur, qui est de faire au travail manuel sa place aussi large et puissante que possible dans les assises de la Société, de lui assurer le bien-être, la libre expression de ses désirs, de ses responsabilités, la possession et la gestion de ses caisses et de ses ressources, le droit d’acquérir et déléguer, etc… Alors que les républicains et les jacobins, contraints de donner un os à ronger aux travailleurs dont ils sollicitaient les suffrages, leur contestaient et contestaient à leurs syndicats le droit de propriété et de transmission de propriété (cela en raison des grands principes révolutionnaires), les libéraux et un trop grand nombre de conservateurs entraient dans cette vue injuste, absurde et courte. Les salonnards, littéralement, s’y ruaient. Que de querelles j’ai menées à ce sujet, dans les milieux où je fréquentais, de 1897 à 1908 notamment, stupé-