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STUPIDITÉ DE L’ESPRIT POLITIQUE.

corps vivant, l’un joignant l’autre. On a honte d’exposer un principe aussi élémentaire. C’est l’expropriation qui est le vol. Or toute révolution aboutit, en fait, à une expropriation, donc à un vol appuyé sur des meurtres.

À quoi les libéraux me répondent, timidement, par la parole de leurs orateurs et de leurs penseurs de néant : « Il y a du vrai, mais c’est exagéré. La propriété n’est pas tant le vol que cela. Elle l’est un peu seulement. » C’est merveille qu’au cours du siècle, avec une si piètre défense, ait été maintenu le principe fondamental de la propriété. Entendons-nous : maintenu, quant à l’individu. La propriété collective et associationnelle a été combattue et finalement annihilée chez nous. C’est même un juriste républicain (c’est-à-dire révolutionnaire), le funeste Waldeck-Rousseau, qui a confisqué les biens de mainmorte, par lesquels s’établissent, en dehors de l’héritage, la continuité de la propriété collective et son inaliénabilité. Waldeck-Rousseau est le type du juriste spoliateur, au fanatisme froid, formé à l’école du XIXe siècle. C’est ce qu’on appelle un grand libéral. Il est un exemple saisissant du ravage opéré, dans les cerveaux, par le libéralisme et le jurisme romantique à partir de 1850 ; et d’autant plus saisissant qu’il était, dans le privé, un parfait galant homme et assez cultivé.

Aphorisme révolutionnaire n° 2 : la famille, c’est le hasard de la rencontre. Il y a famille, sans curé ni maire, dès que deux êtres de sexes différents, couchant ensemble, font un enfant. Cette