Page:Léon Daudet – Le stupide XIXe siècle.djvu/292

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
286
LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

(morale et physique), c’est-à-dire comme un continuel déroulement en nous des formes ancestrales et héréditaires, comme une véritable gravitation de nos ascendants.

Vous voyez où je veux en venir. Sa Science dont le XIXe siècle est si comiquement vain, ne l’a pas conduit, n’a pas conduit ses savants, à aucun moment, à examiner le côté humain, c’est-à-dire caduc, très instructif en même temps, de ses découvertes. Il n’a cessé de dogmatiser celles-ci, et, à mesure qu’elles s’édifiaient, puis qu’elles s’écroulaient, d’inscrire sur elles des ne varietur. Cette manie prépare à notre génération, et à celle qui va nous suivre, d’extraordinaires surprises et déconvenues. Elle est la conséquence, même chez des gens accoutumés à juger les effets et les causes, d’une certaine débilité de l’entendement, jointe à un immense orgueil. Il m’a été donné d’être, pendant quatre ans, l’élève d’un homme d’une bonté célèbre, mais qui m’apparaît en outre, aujourd’hui, comme le plus grand savant peut-être du XIXe siècle, pour des raisons que je vais dire, et qui était le professeur Potain. Jamais le professeur Potain (qui n’avait cependant rien d’un sceptique, au sens « XIXe » du mot) ne généralisait à contre-temps. Il aurait pu, s’il l’avait voulu, comme Charcot, découper arbitrairement des syndromes, les créer, par sa volonté, chez les malades, agir pithiatiquement, inventer, classer et étiqueter des diathèses cardiaques, pulmonaires, rénales etc… Il ne l’a jamais fait. Ses affirmations, très fortes et catégoriques