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DOGMES ET MAROTTES SCIENTIFIQUES.

on s’est contenté pendant soixante-dix ans et davantage, que nous avons vu requérir l’évolution, que nous verrons requérir les localisations cérébrales et qui marque l’apogée de l’abrutissement dans l’enseignement supérieur de nos Facultés.

Constatons que presque autant de sottises ont été solennellement proférées et professées, quant à l’hérédité, au XIXe siècle, qu’il en a été proféré et professé quant à l’Évolution et au progrès. Les mêmes doctes personnages, qui posaient la loi du progrès continu et indéfini par la science, comme réelle, affirmaient aussi l’inéluctable fatalité héréditaire, sans s’apercevoir de la contradiction : L’homme asservi dans sa lignée, l’humanité libre et indéfiniment ascendante, telle était l’antinomie sur laquelle vécurent les deux générations de 1870 et de 1900. La rigidité de l’univers a comme corollaire la servitude héréditaire de l’espèce humaine, elle-même descendant du singe. Ce n’est que vers la fin du siècle que la philosophie française commence à envisager, timidement, la contingence des lois de la nature, nullement rejointe par la psychologie, la physiologie et la clinique, qui en demeurent au « tel père, tel fils » et à la chaîne congénitale infrangible. À l’époque où je concourais pour l’internat des hôpitaux (1891) et qui marquait l’apogée des insanités triomphantes, issues de la Réforme et de l’Encyclopédie et portées sur les ailes de la politique, le monde animé et la nature humaine, le premier créant le second, étaient ainsi considérés comme une sorte de bagne héréditaire,