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DOGMES ET MAROTTES SCIENTIFIQUES.

tions. Cet air pénètre partout jusque dans les laboratoires les plus secrets, les templa serena et les tours d’ivoire. Nul n’y échappe et ceux qui prétendent s’y soustraire en sont quelquefois les plus profondément imprégnés. Je n’ai, pour ma part, jamais connu de savant, si spécialisé fût-il, qui n’eût son coin de prétention encyclopédique. L’homme rêve toujours, même éveillé, et son rêve a la couleur de son milieu. Par contre, j’ai connu beaucoup de savants, chez qui la passion politique et antireligieuse était vive et avouée. Ils foisonnaient au temps de mes études. Le type n’en est certainement pas perdu.

Ce qui reste du transformisme et de ses prétendues lois est déjà bien faible. Qu’en subsistera-t-il dans dix ans ? Autant que du déterminisme peut-être, c’est-à-dire un souvenir historique.

La notion de l’hérédité, de la transmission congénitale a paru, de son côté, faire un bond vers le milieu du XIXe siècle et elle se retrouve dans tous les travaux biologiques, médicaux, psychologiques notamment, qui vont de 1860 à 1914. Dans les deux volumes (L’Hérédo, le Monde des Images) que j’ai consacrés au rôle de l’hérédité dans l’homme, l’esprit humain et l’imagination créatrice, j’ai négligé volontairement la courbe historique du problème que j’agitais et qui se présente maintenant tout autrement qu’à ses origines. L’hérédité m’apparaît aujourd’hui, après trente ans de réflexion, d’observation sur l’homme, et de lectures, comme un attribut, constant et permanent, de la vie,