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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

périmée, aujourd’hui abandonnée par tout homme qui réfléchit et que n’ont point réussi à rajeunir les rêveries biologico-paraphysiques d’un Bergson. On rencontre ainsi, dans les îles de la Sonde, des sauvages encore adonnés à l’idolâtrie d’un fétiche abandonné et devenu incompréhensible, dont on ne sait plus s’il représente un phallus, ou une gourde, ou une borne de champ. J’ai été quelquefois charmé (dans les réunions publiques) d’entendre un bolcheviste, instruit et disert, m’exposer un lambeau de Darwin ou d’Haeckel, adapté à sa sanglante chimère, et qui me rappelait ma jeunesse, et les bâtiments de botanique et zoologie expérimentales de la Faculté de médecine, alors installés derrière le Panthéon, rue Vauquelin. La pensée que l’on remuait encore les masses avec ces antiques balivernes m’enchantait.

La réaction antitransformiste n’a pas encore donné le savant décisif, auquel elle a droit. Mais nous l’attendons de confiance. Il ne peut ne pas survenir ; et contrairement à l’usage, les obstacles, même académiques, auxquels il se heurtera seront faibles. La porte est largement enfoncée. Une lassitude et un dégoût général environnent aujourd’hui les thèses évolutionnistes et leurs explications de musées de cire. L’ontogénie ne paraît plus tant que cela être la reproduction de la philogénie. La barrière, qui séparait les espèces avant Darwin, semble s’être consolidée et renforcée. Les derniers entêtés simiomanes se demandent si le singe ne serait pas un humain dégénéré : et rien n’empêcherait en effet de prendre