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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

vier, personnifiant l’Empire libéral, qui, après le désastre de Sedan, ne put jamais prononcer son discours de réception, et au sujet duquel ceux qui avaient voté pour lui s’écriaient : « Ah ! si nous avions su ! »

On sait qu’en général les hommes politiques, qui donnent ou vendent les décorations, n’acceptent pas de décoration. Celle-ci est remplacée pour eux, quand ils ont quelques années de bouteille, (je veux dire de maroquin), par un fauteuil à l’Académie. Ce fauteuil est, en démocratie, la récompense promise à l’anarchiste ou au socialiste qui a, comme on dit poliment, évolué, qui s’est fait plus ou moins libéral. Prenez un révolutionnaire, trempez-le, pendant plusieurs années, dans l’eau tiède des honneurs et de la fortune, et vous obtenez un libéral. Inutile de citer des noms, ils sont trop. Je n’écris pas ceci pour chagriner quiconque. J’écris ce livre pour instruire, et tâcher d’épargner à la génération prochaine les funestes et sanglantes écoles qu’ont faites ses aînées.

Il y a déjà longtemps que l’Académie française, qui connut autrefois des heures glorieuses, ne sert plus à grand’chose, si ce n’est à faire obtenir à ses membres des émoluments supérieurs, dans les feuilles auxquelles ils collaborent. On dit, et c’est possible, qu’elle aurait conservé un certain prestige au dehors. Cependant je ne m’en suis guère aperçu, au cours des quelques séjours que j’ai faits, dans ma jeunesse, à l’étranger, notamment en Angleterre, en Hollande, en Belgique, en Espagne. Pas une fois je n’ai entendu demander, en parlant d’un écrivain célèbre