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LE STUPIDE XIXe SIÉCLE.

ou étriquée) de 1810 à 1880. À partir de là, commence l’influence prépondérante du criticisme allemand, d’une part, du biologisme anglais de l’autre, dans l’enseignement philosophique. Cependant que sévit, sur le plan de l’enseignement supérieur et scientifique, le déterminisme de Claude Bernard, caricature étriquée du positivisme. Un nom symbolise cette période, celui du déplorable Renouvier, le « Kant français », le plus copieux assembleur d’âneries solennelles d’une époque si féconde en ce genre d’exercices. L’histoire critique de la philosophie donne deux maîtres livres : le rapport fameux de Ravaisson et les Sceptiques grecs de Brochard. Puis, par les consciencieuses études sans génie de Lachelier et de Boutroux, et les vues initiales sur la contingence possible des Lois de la Nature (jusqu’alors déclarées immuables et nécessaires), on verse dans l’évolution créatrice et l’intuitivisme du petit juif tarabiscoté Bergson (c’est-à-dire dans cette aberration que d’autres ont baptisée aussi la métaphysique du sensible), puis dans les platitudes sans nom du pragmatisme américain.

Reprenons, une à une, les pièces de ce fagotage, ces fragments épars, qui ont livré la pensée française et sa traditionnelle clarté à toutes les incursions d’un romantisme idéologique, non moins attristant et funeste que le romantisme littéraire. Il était logique que l’enseignement, à ses divers degrés, l’enseignement qui suit toujours les vicissitudes philosophiques du temps où il est dispensé et transmis, subît une dégradation analogue, des hau-