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LE STUPIDE XIXe SIÈCLE.

tisme. Il en possède les deux principaux caractères : 1° divinisation de l’impulsion sexuelle ; 2° prédominance formidable des moyens d’expression sur les idées ou sentiments à exprimer, en un mot inflation verbale, avec dépréciation consécutive de la valeur réelle des mots. Le vaste tuyau d’épandage rompu, que représente le naturalisme, est embouti et vissé sur les calembredaines panthéistes du vieux Tartuffe, hyperverbal et logomachique, de Guernesey. Tant il est vrai qu’à la confusion mentale a succédé, à toutes les époques, l’apologie des parties basses.

Zola qui, pour son étage intellectuel, n’était pas dénué de ruse, connaissait cette filiation ; il chercha à imiter Hugo en tout (je dis en tout) et à jouer, comme lui, un grand rôle anarchique et politique. Comme lui, il flatta la démocratie, qu’il détestait au fond, avec une impudeur égale à celle de ses badigeons. Comme lui, il usa et abusa de ces grands mots abstraits de Vérité, Justice et Lumière, dont il est bien connu qu’ils sont trop vagues pour correspondre à rien de sincère, sinon à des échappatoires commodes pour le mensonge individuel et universel et pour l’hypocrisie électorale. La fourbe de Zola (fort sensible à l’observateur attentif) était des mieux feutrées et masquées que j’ai connues, telle qu’au confluent de deux races, l’italienne et la française, comme celle de Gambetta. Mais, alors que Gambetta se servait de sa langue pour duper et berner, Zola, lui, se servait de sa plume. Une même fausse rondeur appartenait à l’un et à l’autre.