en effet, du cabotinage et de la mythomanie des invertis, et même des amoureux normaux. Le regard, l’oreille, le toucher, l’odeur surtout, jouent un rôle important dans cet ardent vertige, où apparaissent et flottent, comme au moment de la mort, des aspects, des lambeaux de verbe, de sentiment, ou de paysage, d’apparence hétéroclite. Le désir, poussé à son paroxysme, est une immense déformation, une sorte de cataclysme intérieur, qui sacrifie et immole tout à l’objet désiré. Chez les anormaux, ce cataclysme est encore plus violent et complet que chez les normaux ; ce qui tient sans doute à l’obstacle moral et social, à l’effort fait pour le franchir. C’est de ce point de vue que sont précieuses les confidences et angoisses des invertis. Comme les intoxiqués chroniques, ils éprouvent une sorte de plaisir à se considérer et à se dépeindre ainsi que des damnés, victimes d’une irrémédiable fatalité. Il faut les plaindre en effet, et beaucoup, car l’isolement provoqué par l’aliénation morale est quelque chose d’infiniment douloureux. Mais il faut surtout les engager à se guérir, par une technique volontaire appropriée. Seule l’image peut guérir de l’image. Seule la personimage saine, évoquée à temps, dans une méditation intensive dont je compte un jour formuler la règle, peut guérir de la personimage malsaine. Nous voici au tournant décisif, où la thérapeutique, par les substances chimiques et les serums, doit céder quelque place à une thérapeutique fondée sur la volonté humaine et le choix
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