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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

— Rien ne me scandalise. Popelin, vous m’embêtez.

Ainsi en allait-il rue de Berry. La princesse savait, par ailleurs, que Clemenceau voyait assidûment Mme de Loynes, et ceci la rendait jalouse. Enfin elle avait peur d’être expulsée de France et elle pensait que la fréquentation du leader du radicalisme écarterait d’elle ce cauchemar.

Quand éclata l’affaire de Thermidor, elle se déclara nettement contre Sardou.

— Il avait bien besoin, celui-là, de jeter ce trouble dans la société…

— Mais, madame, il n’y a tout de même pas de loi qui force les Français à admirer et chérir la Terreur.

— La Révolution a fait de grandes choses, et elle a fait, en première ligne, Napoléon.

— Ah Napoléon ! s’écriait Masson, en levant au ciel ses grands bras.

— Ah Napoléon ! répétait avec extase le chœur des dîneurs, gavés de viandes inférieures et de vins frelatés, sous l’œil de douze valets géants en culottes rouges, aux mollets rebondis.

Sardou, d’abord, n’en crut pas ses, oreilles. Eh quoi, Clemenceau allait porter la question à la tribune de la Chambre. L’auteur de Thermidor parlait en roulant les r.

— Alors, on ne peut plus mettre en cause la Rrrévolution ! Mais que devient la liberrrté ! De quoi se mêle ce M. Clemenceau, et ce M. Pomme de terre au lard ? Ma documentation est sûre. Je réponds de tout, et en avant !

— Bravo, Sardou ! criait Sarcey. Toute la vraie France est avec vous.

La vraie France s’en fichait profondément, ne