Page:Léon Daudet – La vie orageuse de Clemenceau.djvu/270

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
269
LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

La France a souffert dans ses campagnes ravagées, dans ses villes ruinées ; elle a des deuils nombreux et cruels. Les provinces délivrées ont eu à supporter des vexations intolérables et des outrages odieux.

Mais vous ne répondrez pas aux crimes commis par des violences qui pourraient vous sembler légitimes dans l’excès de vos ressentiments. Vous resterez disciplinés, respectueux des personnes et des biens ; après avoir battu votre adversaire par les armes, vous lui en imposerez encore par la dignité de votre attitude et le monde ne saura ce qu’il doit le plus admirer, de votre tenue dans le succès ou de votre héroïsme dans les combats.

J’adresse avec vous un souvenir ému à nos morts, dont le sacrifice nous a donné la Victoire ; j’envoie un salut plein d’affection attristée aux pères et aux mères, aux veuves et aux orphelins de France, qui cessent un instant de pleurer dans ces jours d’allégresse nationale pour applaudir au triomphe de nos armes.

Je m’incline devant vos drapeaux magnifiques.

Vive la France !

Pétain.

Ce qu’il y eut, pendant cette période, de plus beau chez le Père la Victoire, ce fut la simplicité héroïque, il n’avait jamais cédé à la grandiloquence, aux heures difficiles de son existence. Il n’y céda pas aux heures glorieuses. Ayant fait, jour par jour, depuis le 16 novembre 1917, tout ce qu’il fallait pour relever un moral tombé bien bas, il ne s’en targua pas plus que le paysan qui a obtenu, à force de soins et de labeur, une belle récolte. Son absence d’apparat fit qu’il n ’affecta même pas le stoïcisme, sa secrète prédilection.