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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

Par la suite Clemenceau alla donner de la voix dans le Var, où on ne lui cria plus « aoh yes ». Il parla à Draguignan et à Cogolin, expliqua à ses auditeurs, ce que c’était que la loi de Séparation, chef-d’œuvre de cet ami du peuple, Aristide Briand et de son intime ami et bon Français de Francfort, Grünbaum Ballin. Il n’ajouta pas que ce même Aristide était aussi l’ami de la galette des jeunes femmes et qu’il avait soufflé les économies d’une petite marchande de tabac de Saint-Nazaire, Anna Olivier, en lui promettant le mariage, Les 75.000 frs une fois boulottés, il avait couru à Jersey, pour un simulacre de mariage avec la pauvrette, puis l’avait abandonnée avec son enfant.

Président du Conseil après la retraite de Sarrien, Clemenceau colloqua son factotum Pichon aux Affaires étrangères et Joseph Caillaux, porteur du grand projet de l’impôt sur le revenu, aux Finances. La séance continua. Telle une bonne cuisinière, il voulait mettre tous les plats au feu en même temps, mais son optimisme naturel l’avait empêché de regarder de près ses collaborateurs et de juger de leurs capacités. Il accordait sa confiance au petit bonheur, jusqu’à ce qu’un renseignement certain, ou un document irréfutable vint modifier, de fond en comble, son appréciation, Alors il se mettait en colère et chassait, comme une mouche importune, le défaillant.

Il attribua à Viviani, grandiloquent imbécile — et qui voulait « éteindre les étoiles », — une nouvelle création ministérielle « du Travail et de la Prévoyance sociale ». Ce choix n’était pas heureux. Viviani, beau parleur atteint de « phasie », était un débile mental, un fou virtuel, qui, lors de la déclaration de guerre de 1914, allait s’effondrer de telle