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LA VIE ORAGEUSE DE CLEMENCEAU

1898, découverte due au commandant Cuignet, l’adversaire de Picquart, plongea le clan de Dreyfus et Clemenceau dans une joie profonde, aussi profonde, quant à celui-ci, que l’étalage à la tribune par Millevoye des papiers Norton. Pendant quelques heures il exulta ; mais la défense bousculante et victorieuse que fit Maurras du malheureux colonel, dans la Gazette de France, le mit en colère admirative. Il déclara : « Le mieux est de ne pas engager de discussion avec M. Maurras », ce qui, pour une fois, était contraire à ses principes. Lors de la grâce de Dreyfus, après la seconde condamnation à Rennes, son irritation fut à son comble. Il eût voulu l’épreuve d’un troisième conseil de guerre, jugée dangereuse par Waldeck-Rousseau. La grâce en effet laissait le problème ouvert et béant devant l’opinion publique, et, par la suite, l’arrêt faussé et truqué de la Cour de Cassation aggrava encore cette impression.

En décembre 1899, Clemenceau quitta l’Aurore dans un accès de mauvaise humeur et, quelques mois après, fonda un hebdomadaire, le Bloc (souvenir de Thermidor) où il traita, avec une verve un peu lourde, des problèmes de grande actualité politique et littéraire. L’article polémique lui était devenu un besoin. Il y examina la question du Maroc, qui commençait à pointer. Néanmoins le Bloc ne prit pas dans le public, et, en mars 1902, cessa de paraître.

Une candidature sénatoriale lui ayant été offerte dans le Var, Clemenceau accepta et fut élu le 6 avril 1902. Après neuf ans d’interruption il rentrait dans la politique parlementaire, avec un discours à la tribune, le 30 octobre 1902 — c’était sous le ministère Combes — sur la fermeture des Écoles. Il y défendit