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L’HEREDO.

qui nous pousse à des actes répréhensibles dont nous porterons ensuite la responsabilité ? Chez l’être sain, nous répondrons que non, qu’une semblable surprise est impossible, à cause de la vigilance du soi. Chez l’être même déséquilibré, chez l’hérédo qui ne s’est jamais exercé à se surveiller, cette surprise sincère doit être encore assez rare, quoi qu’on en ait dit il y a trente ans, aux environs de ce que j’appellerai l’âge d’or de l’irresponsabilité. Nous avons vu — jusque dans le phénomène de l’autofécondation, de la quasi substitution d’une forme héréditaire à l’ensemble de notre moi — la persistance d’une frange de raison, d’une bordure de soi. À plus forte raison cette frange subsiste t-elle, en dehors de ces cas exceptionnels. Elle suffit à rendre problématique la surprise totale de conscience et à maintenir la responsabilité.

La simulation n’existe pas seulement chez les délinquants qui veulent, en présence d’un médecin ou d’un juge, diminuer leur responsabilité. Elle existe aussi, et très fréquemment, chez des êtres faibles, qui se mentent à eux-mêmes quant à l’intégrité et à la vigilance de leur soi, qui se jouent, en dehors même de