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L’HÉRÉDO.

même qu’il est l’essence de la personne, au lieu que le moi, chargé d’hérédismes, est au contraire individualiste ; le moi gravite, mais ne se répand pas. Dans le domaine psycho-moral, comme dans le domaine physiologique, on doit se répéter que qui se dépense gagne.

Aussi faut-il attacher de l’importance à l’oubli héréditaire, à la fuite des constellations ataviques jusqu’aux confins de la connaissance, — confins qui d’ailleurs, nous l’avons vu, ne sauraient être qualifiés d’inconscients. Il y a des êtres légers, au physique comme au moral, chez qui les qualités et les tares venues des ancêtres marquent peu et qui n’y attachent pas d’importance. Malléables et furtifs, ils passent à travers le feu sans se brûler. Ils s’en tirent avec un tic facial ou une crampe spasmodique, là où un autre eût récolté de l’épilepsie. Ils s’en tirent avec une bronchite chronique, là où un autre eût récolté une caverne pulmonaire, ou une péritonite tuberculeuse. L’inattention profonde peut devenir ainsi, dans certains cas, une sauvegarde.

À y regarder de près, cet oubli, par fuite psychostellaire, est ainsi une conséquence du soi, un acte de souverain équilibre. Le soi