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L’AMOUR HUMAIN.

dants avares ou prodigues, ou les deux à la fois, à une tyrannie intolérable. Je connais le cas d’une grande dame, archimillionnaire, qui en était arrivée, le jour du règlement de ses bienfaits, à jeter la monnaie et les billets par poignées aux infortunés, qui devaient les ramasser, à quatre pattes, sous tous les meubles. Il lui fallait l’excitant de l’affront !

On m’a cité cet autre cas d’une personne colossalement riche, qui pratiquait le supplice de Tantale sur ses visiteurs et parasites. Elle leur interdisait toute conversation sur les questions d’intérêt. Il devait être entendu, quand on était chez elle, à sa table ou dans son salon, que personne jamais ne manquait de rien, ni n’avait besoin d’argent. À ce prix, on demeurait dans son amitié. Elle conserva néanmoins, bien que laide et odieuse, une petite cour, parce que les gens espéraient toujours que la consigne se relâcherait. On n’en finirait pas d’énumérer les lubies des riches et les pièges de leur apitoiement. La possession de l’argent, par les possibilités qu’elle ouvre dans tous les ordres et les désillusions qu’elle entraîne, épanouit facilement les hérédismes. Sa force est aussi redoutable qu’un élément et ajoute