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L’HÉRÉDO.

persuasive, le visage serein. La curiosité scientifique soutenait et portait ce grand vieillard. Il nous montrait son petit jardin, planté d’espèces rarissimes, avec cette minutie et cette précision qu’on remarque aux derniers dessins d’Hokousaï et aux dernières peintures de Franz Hals. Chacun de ses mots, de ses silences était significatif et plein de sous-entendus. Il émanait de lui une impression merveilleuse de calme et de lumière apaisée, ainsi que d’une prière ambiante. Tous ceux qui ont approché le père Chanoux, recteur de l’hospice du Petit-Saint-Bernard, ont senti que sa seule présence les augmentait, les ennoblissait, les élevait au-dessus d’eux-mêmes. Devant lui la bassesse avait honte d’elle-même et l’orgueil se trouvait ridicule. Il rendait aux vertus, par son simple contact, leur hiérarchie et leurs perspectives.

Fabre de Sérignan était le type du soi improvisateur et sans entraves. Il sut se méfier toujours des vastes théories, qui sont en général des interpositions héréditaires, ainsi que nous l’avons dit pour le darwinisme. Il observait à la fois méticuleusement et largement, comme un pâtre qui surprend les secrets de