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L’HÉRÉDO.

venant au monde. Ainsi, en allant jusqu’au bout de ma pensée, c’était le transmissible et le transmis, c’est-à-dire l’héréditaire, qui vieillissait avec l’individu, disparaissait avec la lignée, au lieu que l’intransmissible, que l’individuel était quasi inaltérable pendant la vie et immortel après la mort. Ce « quelque chose » c’était le soi, dont l’immortalité ne peut être qu’une réalité absolue, au lieu que l’immortalité du moi — sa transmission héréditaire — est conditionnelle et figurative… Puis cette idée s’effaça, plongea : je ne devais la retrouver que vingt ans plus tard, comme une de ces étoiles qui reviennent au firmament visible, après un long périple à travers l’espace invisible.

Je viens d’analyser l’héroïsme chez des hommes célèbres. Mais il existe de nombreux héros, de nombreuses héroïnes, inconnus de tous et d’eux-mêmes. Ils apparaissent à l’occasion d’une circonstance tragique, d’un cataclysme, d’une épidémie, d’une grande guerre. On s’étonne alors de leur nombre et de leur valeur. C’est le soi qui, domptant le moi, fait des siennes à travers la race.

J’ai connu une pauvre infirmière, âgée